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258002

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Remarques à propos du compte-rendu de Bjerrum

sur quelques travaux récents dans le domaine de la phonologie des langues nordiques (C. Borgström, "Zur Phonologie der norwegischen Schriftsprache", A. Martinet, "La phonologie du mot en danois")

Louis Hjelmslev

pp. 59-60

Séance du 3 mai 19381

1Il y a deux « phonologies » radicalement différentes : celle qui est purement phonique et qui vise à opposer sur cette base l’espèce à l’individu (ou le type à la réalisation),2 et celle qui se réclame de l’épreuve de la commutation et qui se fonde par là-même sur la fonction linguistique des unités d’expression. Hjelmslev se déclare d’accord avec Brøndal qu’il convient d’éviter les termes superflus, et surtout les termes mal définis et qui prêtent à l’équivoque ; de toute évidence le terme de « phonologie » en constitue un exemple. Le terme de « phonologie » pourra toutefois être employé utilement pour désigner d’emblée les essais qui ont été faits pour décrire et classer les sons du langage sans fonder cette étude uniquement sur la langue, définie comme une forme indépendante de la substance ; la « phonologie » de Prague, tout en se fondant sur l’épreuve de la commutation, y appartient dans toutes ses nuances. Il convient de distinguer de la « phonologie » ainsi définie deux courants de la linguistique moderne qui sont beaucoup plus près de réaliser une véritable théorie de l’expression linguistique : à savoir la phonétique française d’une part, la théorie phonémique de Daniel Jones, de l’autre. Martinet a bien vu la valeur d’un point de vue purement fonctionnel et strictement linguistique, et par la méthode il hésite dans une certaine mesure entre la phonologie et la linguistique. Il abandonne en principe résolument le point de vue linguistique et s’adonne la plupart du temps à un procédé purement inductif d’ordre phonique et psychologique. Le travail de Martinet est malgré tout une contribution importante à l’étude du danois aussi bien qu’à la linguistique générale ; c’est un livre plein de faits exacts et qui donne ample matière à réflexion. Il convient de retenir, parmi les résultats apportés par Martinet, ceux qui sont fondés sur un examen des faits fonctionnels ; dans ces endroits (parmi lesquels le traitement du stød est surtout digne d’attention) Martinet continue les meilleures traditions de la phonétique française.

    Notes

  • 1 [Texte publié en français en (1939), Bulletin du Cercle Linguistique de Copenhague, 4, pp. 12-16].
  • 2 C’est la phonologie selon Grammont (Traité de phonétique, Paris 1933, p. 9-10).

Publication details

Published in:

Hjelmslev Louis (2022) Essais et communications sur le langage, ed. Cigana Lorenzo. Genève-Lausanne, sdvig press.

Pages: 59-60

Full citation:

Hjelmslev Louis (2022) „Remarques à propos du compte-rendu de Bjerrum: sur quelques travaux récents dans le domaine de la phonologie des langues nordiques (C. Borgström, "Zur Phonologie der norwegischen Schriftsprache", A. Martinet, "La phonologie du mot en danois")“, In: L. Hjelmslev, Essais et communications sur le langage, Genève-Lausanne, sdvig press, 59–60.