Séance du 16 février 19391
1Hjelmslev distingue, avec Scripture, la phonétique myocinétique ou étude des mouvements des organes de la parole, la macrophonétique ou étude des vibrations des organes, et la microphonétique ou étude des ondes acoustiques. Il résume les conditions qui doivent être remplies pour qu’un appareil soit utilisable pour des buts phonétiques : il faut exclure les interférences de type technique (les déformations dues à l’appareil même), physiologique et psychologique (déviations de la prononciation dues aux conditions dans lesquelles se fait l’expérience) ; il faut que l’acte de parole enregistré soit reproduisable sous une forme exactement identique. Hjelmslev montre que, par opposition à celle de l’ancienne phonétique expérimentale, la technique moderne dispose d’outillages et de procédés aptes à remplir ces conditions. L’introduction du microphone et du gramophone rend possible d’établir dès maintenant une macro- et micro|phonétique, en appliquant un modèle amélioré de l’appareil enregistreur d’une part, l’oscillographe de l’autre. Mention détaillée de la technique utilisée par E. et K. Zwirner, des divers types d’oscillo|graphes et des expériences récentes d’ordre spectro-analytique accomplies par Vierling et Sennheiser. Certains analysateurs méca|niques, tels que l’analysateur mélodique de Grützmacher et Lotter|moser, l’intensimètre et le spectromètre de fréquences, rendront désormais possible au linguiste de manier lui-même l’outillage expé|rimental, condition indispensable pour que les problèmes soient posés d’une façon justifiée et fructueuse. L’ensemble de l’outillage décrit ne se trouve encore dans aucun laboratoire, mais, une fois coordonné et mis en œuvre, il permettra au linguiste d’établir pour la première fois une science phonétique irréprochable à tous les égards, une phonématique qui prend son point de départ dans les données immatérielles de la linguistique pour procéder à l’investiga|tion à la fois déductive et empirique de leurs manifestations phy|siques. Cette nouvelle discipline remplace heureusement la phoné|tique classique, y compris et l’ancienne phonétique expérimentale avec ses « objectivations » imaginaires et ses problèmes inutiles, et la phonologie dans toutes ses nuances, qui hypostasie également les faits physiques et les appréciant subjectivement et en négligeant les fonctions linguistiques. Enfin la nouvelle phonématique expérimen|tale fournira les correctifs nécessaires à la phonétique myocinétique, dont le problème reste capital, surtout au point de vue pratique, mais qui, même en utilisant le radiofilm sonore, n’est pas à même de donner par elle-même des résultats solides.
2Cf. Louis Hjelmslev, Ny experimentalfonetik (Nordisk Tidsskrift for Tale og Stemme, III, 1939, p. 75-94); id., Neue Wege der Experimentalphonetik (ibid. II, 1938, p. 153-194).